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Ma responsabilité

melisarachelle
Je suis en train de terminer ma formation de thérapeute ACP-Focusing. Bien que les outils d’accompagnement thérapeutique me soient parfaitement transmis à travers une pédagogie excellente, il y a un certain nombre d’autres éléments qui me dérangent profondément dans cette formation.

Voici pour les deux points principaux :​

D’abord, le contrôle des acquis est aléatoire. Chaque membre peut passer en deuxième année sans avoir validé la première, un membre peut même intégrer la deuxième année sans avoir fait la première, en fait n’importe qui peut arriver à n’importe quel moment, manquer des modules, partir, revenir. Et lors de la dernière session de formation, nous avons accueilli une personne qui venait découvrir le focusing. Elle a passé deux jours avec nous. Tout cela mit bout à bout a pour conséquence, à mes yeux, que nous en sommes encore, dans les échanges en grand groupe, aux questions de bases, les mêmes qu’il y a un an. Celleux qui ont le moins acquis les principes de bases sont naturellement celleux qui posent le plus de questions et donc les temps en groupe sont presqu’exclusivement réservés aux notions de bases, encore et encore. De mon côté, je me suis énormément investie, j’ai rendu tous les travaux en temps et en heure, validé tous mes comptes-rendus d’entretien, raté aucun module, fait toutes les lectures et pratiqué énormément entre chaque session. Du coup, je passe maintenant beaucoup de temps à attendre et à m’ennuyer au sein du groupe. Je continue à apprendre énormément dans les pratiques à deux ou trois mais les temps en grands groupes (ils sont quand même nombreux), sont devenus inintéressants pour moi. Alors je reste là, à attendre, à m’ennuyer, et à me tendre à l’intérieur. Je ne me sens pas à ma place, j’ai le plexus solaire qui chauffe. Chaque nouvelle question me fait pousser un grand soupire intérieur et ajoute encore à ma tension. Je dois faire taire tout ce qui en moi est prêt à apprendre plus, à aller plus loin, à m’ouvrir de nouveaux espaces intérieurs.​

Ensuite, la formation a lieu dans une auberge de jeunesse accueillant entre autres des réfugiés. Il y a une grande télé dans le couloir, à côté de la machine à café. Le plus souvent elle marche à fond. L’année dernière on était dans la grande salle qui donne directement sur le couloir, on entendait donc la télé pendant les temps de formation. Maintenant on ne l’entend plus de la salle où on pratique. Il y a eu une session où un mec venait nous brancher à chaque pause en mode « salut les filles, comment elles vont les demoiselles », et n’était pas content quand on ne lui répondait pas. Il y a eu deux fois de la bagarre dans l’auberge, une fois devant les vitres de notre salle de travail, une fois au réfectoire. Les salles ne sont pas nettoyées après le premier jour de formation donc au troisième jour le sol est sale, et comme on partage souvent un apéro le vendredi soir (deuxième jour), le lendemain, les petites poubelles de la salle débordent et les bouteilles vident de la veille sont posées à côté, et on travaille là, à côté des ordures et dans la poussière. Bref. Ce lieu n’est vraiment pas accueillant, ni confortable, c’est en pleine ville, il n’y a aucun lieu de ressourcement autour. Le mois dernier nous sommes deux à être parties avant la fin, ne supportant plus le manque de confort, de beauté, de propreté du lieu. Réponse de la formatrice quand on lui a annoncé qu’on ne ferait pas la dernière demi-journée : « de toute façon, il y en a toujours qui ne sont pas contents » et « c’est intéressant d’observer comment on peut être bien dans tous les endroits ou pas »…
Après la dernière session, j’ai donc passé mon temps à ressasser tout ce qui n’allait pas dans cette formation, à me dire que je n’y remettrai plus les pieds, malgré tout ce que j’y apprend dans les pratiques à deux. J’ai tourné en boucle dans ma tête pendant dix jours en mode : « Ce lieu est totalement révélateur d’un manque  de respect pour les étudiants. Il n’y a pas de considération pour nous » et « Ce nivellement par le bas, j’en peux plus. C’est totalement absurde ce système qui laisse rentrer tout le monde n’importe quand, sans aucune structure. Ca devrait pas être comme ça ».​

Ces boucles mentales ont fait leur show dans ma petite tête pendant dix jours puis quelque chose s’est passé… L’énergie de reproche s’est épuisée et a fini par laisser la place à : « Bon, je dis tout le temps que je créé ma propre réalité, c’est moi qui ai atterri là, personne ne m’a forcée à me retrouver ici, j’y suis arrivée toute seule comme une grande. Je ne me suis pas amenée dans une formation où les acquis sont vérifiés au sein d’un cadre qui garantit l’avancée du groupe et d’un lieu ressourçant où je ressens l’harmonie autour de moi. Alors pourquoi ? ».​

Et là, tout à coup, j’ai vu : La valeur que je ne me donne pas. Ce lieu inconfortable et disharmonieux, c’est l’exact reflet de la valeur que je me donne. J’ai vu ce qui en moi croyait ne pas mériter mieux. Et il y avait un autre élément : Je crois encore qu’il faut souffrir pour grandir, que l’éveil de conscience ne peut pas se faire dans la beauté et l’harmonie, il faut du chaos.​

Puis je me suis dit : Puisque ce groupe ne me permet pas d’évoluer à mon niveau, qu’est-ce qui en moi ne me permet pas d’évoluer à mon niveau ? J’ai voulu connaître la vraie réponse à cette question. Je n’ai pas « réfléchi », j’ai laissé venir, en auto-focusing, j’ai fait le chemin. Et cela m’est apparu très clairement. Je ne me valide pas moi-même tout le chemin de désidentification que j’ai effectué. Je ne me valide pas que j’ai entrepris ce chemin à l’âge de vingt ans (après avoir épuisé, depuis l’âge de douze ans toute la littérature psy et développement personnel que j’ai pu trouver), que j’ai cherché, à partir de cet âge, le bouton « off » de mon mental pour entendre les courants profonds qui me traversent, pour devenir consciente de mes croyances profondes, très souvent l’exacte inverse de ce que je crois consciemment. Je ne me valide pas que j’ai vécu, encore et encore et encore, des expériences d’éveil où je me suis sentie transpercée par l’Amour, de plein de manière différentes, avec toujours le point commun de me plonger dans une confiance absolue envers la vie. Je ne me valide pas que mes quinze ans de danse consciente à attendre le mouvement « juste », à voir passer tous les mouvements de surface, d’identification, de fausses croyances, d’émotions, puis à laisser être le vrai en moi, dans mon corps, dans chacun de mes gestes, m’ont fait grandir en conscience.​

En focusing, on appelle ce voyage au sein de nos différentes couches intérieures « l’holo-mouvement ». Je ne l’appelais pas comme ça avant mais je le pratiquais, depuis quinze ans. Je le pratique depuis quinze ans. J’ai vu les innombrables pièges que me tend mon égo pour m’éviter de sentir ce qui est vrai en moi. J’ai vu, et bien souvent pris, tous les chemins de traverse qu’il me tendait. Après probablement des milliers d’heures à faire cela, je connais le bouton maintenant. Je l’ai trouvé. Je sens sur commande désormais où ma conscience se situe, d’où vient le mouvement qui me traverse. Alors quand j’entends des heures de conversation sur « c’est quoi cet holo-mouvement », « quels sont les différents niveaux qui l’habitent », « mais est-ce qu’on peut pas s’égarer là-dedans », « comment je reconnais si c’est un mouvement vrai ou si c’est mon mental qui me raconte des choses » et « la présence c’est quoi » en étant en position d’apprenante, hé bien je m’ennuie, profondément. Tout ce que j’ai envie de partager de mon expérience, de mon exploration, de mes égarements, des subtilités de ma psyché que j’ai découvertes, des plans tordus de l’égo pour nous maintenir dans son tout petit monde, ne peut pas s’offrir car je ne suis pas en position d’enseignante. Je suis censée être apprenante, de choses que je sais déjà.​

Et là où je suis, cette formation, ne me porte pas plus haut, pas dans les échanges en groupe. Elle m’apprend à accompagner les personnes en séances individuelles. A travers chaque pratique de l’ACP et du focusing à deux ou trois, elle me permet de poursuivre mon chemin intérieur, de grandir en conscience, de me défaire encore de fausses croyances, de traumas.​

Mais en groupe, elle ne m’apprend presque plus rien.

A part cela : Il est temps que JE ME VALIDE dans ma position d’ENSEIGNANTE de la conscience, de la désidentification, de l’Amour.  ​

Et il est temps que je valide que je peux continuer à grandir en conscience, sans souffrir, dans la joie, la beauté et l’harmonie.

Alors… Pourquoi cet article s’appelle « Ma responsabilité » ? Hé bien, parce que dès lors que j’ai vu en moi le reflet exacte de ce que je croyais n’exister qu’à l’extérieur de moi, il m’est apparu comme une évidence que cette formation était absolument parfaite pour moi, exactement telle qu’elle est. C’est le cadre dont j’avais exactement besoin pour identifier et transformer ce qui me freinait à l’intérieur de moi. A partir de ce point de vue, je n’arrive plus à voir qu’il y a des problèmes dans cette formation. Je vois toujours le nivellement par le bas et l’inconfort du lieu, mais je reconnais que cela est parfait, que sans cela, je n’aurais pas grandi en conscience là où j’avais besoin de grandir, je n’aurais pas éclairé les zones en moi qui avaient besoin de lumière.​

J’ai vécu de l’intérieur, en direct, qu’en prenant la pleine responsabilité de là où je suis, en annihilant (au moins pour un moment) la pensée que l’autre est responsable de quoi que ce soit qui me concerne, je me libère. J’ai tout à coup le pouvoir de transformer les choses. Tant que je suis coincée dans « c’est l’autre qui devrait faire/être autrement », je me sens victime, et tant que je me sens victime, les solutions ne m’apparaissent pas. Dès lors que je me responsabilise, les solutions m’apparaissent, et elles n’ont même pas besoin de l’autre pour s’appliquer.​

Tant qu’il y aura sur Terre une Mélisa qui ne se valide pas dans ses compétences, il y aura l’exacte contexte pour exemplifier cela. Chaque partie est indissociable de l’autre. Pour simplifier encore plus : Tant qu’il y aura une victime, il y aura un bourreau pour lui montrer qu’elle est victime. Et cela se décline à l’infini, pour les actes les plus graves.​

Les bourreaux auront donc bon ton de retourner cette vérité contre leur victime en mode « c’est intéressant de voir pourquoi tu as besoin d’être dans un endroit sale. Et comme c’est intéressant, je ne suis en aucun cas responsable d’avoir choisi ce lieu pour donner mes formations »  et ainsi continuer de jouer parfaitement leur rôle… Mais attention : Le fait que l’un (la victime) ait besoin de l’autre (le bourreau), n’empêche aucun des deux de se retirer du jeu à n'importe quel moment.​

Ainsi nous serons, un jour, tous libéré-e-s.​

Pour ma part j’ai décidé de terminer ma formation, parce que j’apprends énormément dès qu’on pratique, parce que c’est bientôt fini et parce que j’ai besoin d’aller au bout de ce que j’ai entrepris, parce qu’aussi j’y ai rencontré des personnes magnifiques dont l’amitié et la conscience me nourrissent profondément.​
Et maintenant que je ne crois plus qu’il faut souffrir pour grandir et que je me valide mon propre chemin intérieur, si ça se trouve, je vais percevoir les choses d’une toute autre manière… Prochaine session dans un mois.



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